Voilà un livre que je rencontre de plus en plus souvent chez mes voisines de blogo mode : L’art de la simplicité de Dominique Loreau. Certaines le découvrent tout juste, d’autres - comme moi - entretiennent déjà une relation de longue date avec lui.
Ce qui m’interpelle ? Ce bouquin semble provoquer la même réaction primaire chez tout le monde (enfin, chez tous ceux qui n’ont pas déjà un pied dans tout ça… ) : soudain, on manque d’air !
À la première lecture, j’ai été comme fascinée par ce livre, par cette simplicité dont l’auteure parle si bien. Sous sa plume le minimalisme devient luxe et volupté, le désencombrement devient pureté et liberté. Le livre à peine refermé, ma première réaction fut donc de me lancer dans un grand ménage de printemps…
Vider mon armoire de mes vêtements trop petits et élimés, finir les paquets de thé presque-vides-mais-pas-tout-à-fait qui trainent là depuis des mois, donner mes fonds de détergents à qui s’en servira, jeter - enfin ! - un tas de bricoles cassées, inutilisables, incomplètes, etc.
Et je me suis sentie bien mieux !
Mais ça n’a duré que quelques mois…
Ensuite, le sentiment de trop est revenu. Alors, régulièrement, je me suis replongée dans la lecture de ce livre, comme on lit et relit un belle histoire, une histoire qui nous fait du bien, une histoire qui nous berce de la promesse d’une vie meilleure. (C’est tout l’intérêt des livres du rayon « développement personnel », non ?)
Aujourd’hui, cinq ou six ans plus tard, je me rends compte que mon grand ménage n’avait rien de vraiment libérateur. Ce n’était qu’un grand ménage ! Utile, voir nécessaire, mais en aucune façon susceptible de m’apporter la légèreté attendue…
J’ai désormais pris de la distance face à ce livre ; je ne le relis plus, je n’en ai plus besoin. J’ai mis de côté les conseils concrets de Dominique, pour n’en garder que l’essence : « ne laissez pas vos objets vous encombrer ! »
Un mantra qui, chez moi, se traduit par : « Ne restez pas enchainés à votre passé et à vos chemins détournés ! Parce qu’il est normal de se perdre et de s’essayer, mais que l’on avance mieux sans poids superflus et sur une route bien dégagée. »
Concrètement ?
Un exemple :
Le golf… vous vous y êtes essayé 2 ou 3 fois, et ça vous plait ! Vous achetez donc un set : des clubs, des balles, un caddie. Rien d’extravagant, juste le nécessaire. Et vous y allez, 1 fois, 2 fois, 10 fois… mais vous finissez par vous lasser, vos sessions s’espacent, jusqu’à ce que votre équipement finisse par prendre la poussière au fond du garage.
Et puis, vous vous êtes rendu compte qu’en fait, le tennis, c’est vachement mieux. D’ailleurs vous vous êtes acheté une belle raquette, et toutes les semaines vous tapez la balle avec votre collègue de bureau… enfin… vous y allez cinq, six fois… jusqu’à ce que l’excitation de la nouveauté retombe et que votre raquette finisse bien rangée dans le garage, juste à côté de vos clubs de golf…
D’ailleurs, depuis que vous avez sympathisé avec votre voisin de pallier, vous avez bien envie de vous mettre à la guitare…
Ça vous rappelle quelque chose ? C’est normal. On se cherche, on se teste… il faut s’y frotter pour savoir si ça nous plait.
Le problème, c’est qu’à chaque fois que vous y mettez les pieds dans ce foutu garage, vous ressentez comme un malaise : tous vos rêves de bonheur dans l’effort et de plaisirs partagés étalés là, comme ça, sous vos yeux, à vous regarder du coin de l’œil, à vous rappeler le nombre de fois où vous avez lâché l’affaire… « il faudrait que je m’y remette quand même ! »… ça vous encombre. Et même une fois la porte du garage refermée, ça vous encombre toujours, comme un nuage tout gris qui plane au-dessus de votre humeur, au dessus de votre estime de vous, de votre confiance en vous et en votre capacité à choisir pour vous-même…
Alors, qu’en vrai, si vous avez lâché l’affaire, c’est que vous n’y avez pas trouvé pleinement votre compte. Et c’est tout ! Ça vous a plu, un peu. Parce que ça vous a permis de vous changer les idées, ou de partager une découverte avec un copain… mais l’activité en elle-même ne vous plait pas à ce point là !
La simplicité volontaire, pour moi, c’est ça : apprendre à tourner la page. « J’ai essayé, je n’ai accroché qu’à moitié, je laisse couler. Je revends le matériel, le gain financera ma prochaine lubie, mon prochain rêve. » (D’ailleurs, à ce jeu là, on comprend vite le potentiel gigantesque qui se cache derrière le marché de l’occasion. Et, on fait des économies monstrueuses. Et, sans se censurer ou se priver pour autant… )
Mais, il est vrai que ce n’est pas facile. Parce que ce ne sont pas de simples objets dont on doit accepter de se détacher… ses objets - parfois en parfait état et choisis avec soin, d’autres fois très fatigués - nous les avons investis de nos rêves ; de petits rêves sans prétention : des sourires, des rires, de petites victoires, des instants partagés… et c’est encore plus dure lorsque l’on sent « qu’y arriver » et à notre portée. Parce qu’il faut - en plus - digérer le fait que capacité et plaisir ne vont pas toujours de pair…
Pourtant, au final… c’est fou ce que ça fait du bien ! Tourner la page, c’est se retrouver devant une page blanche. Effrayant au début ! Et un vrai bonheur, quand à force d’éliminer tout le superflus apparait l’essentiel : ce qui nous fait vraiment vibrer. Présent - souvent - depuis toujours, mais enfoui sous des tonnes d’illusions et de rêves qui ne sont pas les nôtres.
L’Homme a ainsi revendu sa guitare. Une guitare magnifique, achetée avec son cœur… mais dont il ne se servait que très peu. Avec l’argent de la vente, il veut s’offrir une vraie, une belle gazinière. C’est bizarre non ? Pourtant, c’est là qu’il s’éclate ! Toujours une nouvelle recette en tête, toujours à la recherche d’idée, et de quelqu’un avec qui en discuter…
D’ailleurs, une fois, que l’on a pris ce virage, ça devient vite une façon de vivre : à la maison, les livres sortants financent les nouveaux arrivants. Idem pour les CD, les DVD, les jeux vidéos, les meubles, l’électroménager, le matériel informatique… presque tout en fait. L’argent des ventes finit dans une boite, et la boite finance nos envies. (Et ce qui ne peut-être vendu ? On donne ! En dernier recours, on jette.)
Et la liberté - spatiale, émotionnelle et financière - du désencombrement apparaît, enfin…
…
Notes :
1- Ce que ce livre n’est pas !
- un livre écolo (simplicité volontaire et écologie peuvent très bien fonctionner l’un sans l’autre… )
- un livre sur la décroissance (idem)
2- Par extension, la simplicité volontaire c’est aussi éliminer tout ce qui nous empoisonne notre bien être quotidien. Par exemple : cette p@$& d’agrafeuse qui agrafe une fois sur deux, et avec laquelle vous passer plus de temps à vous battre qu’à agrafer vos documents. Ou alors, cette p@$& de poignée de porte qui grince à chaque fois que vous y touchez… quand on peut le faire, éliminer ces multiples sources d’inconfort qui n’ont l’air de rien mais qui - ajoutées les unes aux autres - tapent vraiment sur le système, ça fait vraiment du bien !
3- Quand l’envie de désencombrer nous envahit, nous avons tous tendance à voir d’abord le trop des autres (conjoint, enfants, parents, amis… ) Mais, s’il est vrai que pousser Monsieur à vider un peu ses placards peut désencombrer votre maison, l’opération - souvent énergivore ! - n’a aucune chance de vous désencombrer vous !
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par L’art des listes | Le blog de Lily
01 juil 2011 à 19:57
[…] de la simplicité » dont je vous ai parlé lors de l’ODF, et dont Miss Tizia parle si bien dans son dernier […]
par Simplicity
23 avr 2012 à 23:53
Pour l’instant, à deux ans du “grand début”, je garde encore le livre de Loreau pas loin, mais c’est vrai que j’y touche moins qu’au début.
Pour ce que tu dis à la fin, c’est tellement vrai : j’ai de plus en plus de mal à aller chez les gens. Pour le dire crument : ” j’étouffe dans leur bordel”.
Depuis que je vis en Irlande, on ne voit plus grand monde car on ne connait personne ici, et je suis bien mieux : n’avoir pris que 3 valises pour deux pour un an, ça aide